Sardaigne, la reine de la mer
Chia en première position, la côte de Baunei à la quatrième place, la péninsule du Sinis à la septième, San Teodoro à la huitième, la Gallura à la treizième et la Baronìa à la vingtième. Première marche du podium, quatre littoraux sardes dans le top dix des «5 Vele» et deux autres parmi les vingt-deux destinations récompensées.
En 2025 la Sardaigne est une fois encore le leader dans le classement de Touring Club et Legambiente et confirme les six tronçons côtiers déjà récompensées les années passées, pour leur valeur environnementale par les voyageurs experts, habitués aux beautés du monde entier, et par celui qui, par passion et métier, est engagé depuis toujours en défense de l’environnement naturel.
Touring Club et Legambiente célèbrent ainsi la mer de l’Île, en satisfaisant la tendance innée des communautés qui l’habitent à respecter leur propre terre et leur vocation à accueillir et à héberger. Le prix des 5 Voiles va des lieux magnifiques, dont certains sont très connus, à d’autres qui attendent d'être découverts. Du nord au sud, de l’est à l’ouest, aucun littoral n’en est exclu.
Les mines, séduites et puis abandonnées
L’’Île aux veines d’argent ’, c’est ainsi que l’appelaient les anciens peuples et les marchands. Nous le percevons en l’observant et en marchant dessus : c’est une terre ancienne qui a emprisonné les matériaux les plus précieux au cours des ères géologiques. Ainsi le destin a voulu que l’on creuse, jusqu’à la fin du XXe siècle, dans des centaines de puits et de tunnels, un dur labeur effectué par des milliers de mineurs sardes dans des environnements lugubres et fragiles, mettant en péril leur santé et leur vie. La grande épopée minière n’a pas laissé de prospérité économique mais un immense patrimoine d’archéologie industriel enchâssé dans les paysages les plus insolites de la Sardaigne. Ces mines, autrefois grouillantes d’activité frénétique à l’intérieur et à l’extérieur des tunnels, sont aujourd’hui dépositaires des larmes versées dans les ténèbres par des générations d’ouvriers, certains desquels sont devenus des guides touristiques privilégiés pour faire connaître le sens profond des lieux de travail de souffrance et en même temps magnifiques. Des falaises, des dunes de sable, des cavités karstiques, des forêts sauvages et le bleu de la mer sont la toile de fond de huit zones minières qui forment ensemble le parc géo-minier de la Sardaigne, une excellence du réseau mondial des géosites Unesco en raison des extraordinaires installations industrielles et pour le charme intemporel des paysages dont les mines abandonnées font partie.
Une étreinte chaleureuse de la mer
Les brises et la houle dérobent à la mer un riche aérosol de sels et d’ions minéraux qui enveloppe les côtes de l’Île d’air pur, à respirer lentement et à pleins poumons. Extraordinairement belle, saine et pleine d’éléments précieux, elle se brise ensuite sur les paysages marins toujours différents, de petites îles, baies, plages de sable, quartz et coraux et des terrasses fantastiques de rochers. Ils deviennent tous d’exclusifs spas sur la mer sans limites d’horaires et de règlements, sans frais ils offrent le top du bien-être au naturel, eau, soleil, pierres, coquilles, rochers et sable. Ce sont les gymnases accueillants en plein air toujours ouverts pour tous ceux qui veulent se ressourcer en toute liberté et se débarrasser de leurs problèmes. Généreux mais fragiles ils demandent uniquement à être respectés car ils demeurent une réserve précieuse de bien-être, pour toujours et pour tous.
Scénographie sous le ciel étoilé
« Les îles du cinema » est un circuit de quatre festivals sur les îles mineures de la Sardaigne. Tavolara devient à la mi-juillet une immense salle sous la voûte étoilée, pour la Notte in Italia (nuit en Italie). Créé en 1991, ce pittoresque rendez-vous, devenu depuis un classique du paysage national, se concentre sur les réalisateurs et la créativité du cinéma italien. La rencontre et la connaissance entre public, artistes et responsables ont déjà lieu sur les bateaux qui rejoignent l’île au départ de Porto San Paolo, près de San Teodoro au sud d’Olbia. Dans trente ans, la crème du cinéma italien a foulé le seul tapis rouge qui trempe directement dans la mer, dans le cadre splendide de l’aire protégée de Tavolara-Capo Coda Cavallo. Le vernissage de «Una notte in Italia» 2024 mardi est 16 juillet, à la Peschiera di San Teodoro. Deux jours plus tard, le festival se déplace sur la petite place au bord de la mer à Porto San Paolo, tandis que du vendredi 19 jusqu'au dernier soir du dimanche, les spectacles se déroulent dans l'immense salle sous les étoiles de Tavolara, la montagne de granit qui s'élève de la mer.
L’exposition de l’Artisanat
L’essence de la Sardaigne est dans la trame d’un filé, dans les broderies d’un tapis et dans les formes d’une élégante robe traditionnelle. Son esprit est ‘tressé’ par des mains habiles dans une corbula de jonc ou d’asphodèle, il est enchâssé dans une maille filigrane, la technique par excellence de l’orfèvrerie sarde. La lumière de l’Ile brille dans une lame d’arresoja, dans le reflet d’un objet en verre ou dans le rouge intense d’un collier en corail. Son feu brûle dans la forme d’un meuble en fer forgé. Son âme est dans une sculpture en pierre, un symbole archaïque d’une terre millénaire. Connaitre la Sardaigne signifie s’enfoncer dans son identité la plus profonde et authentique à travers les techniques de décoration d’une scivedda (un récipient en céramique) et de gravure du bois d’une cascia (coffre nuptial) et de masques de carnaval, elle est dans le tannage des peaux pour en obtenir des chaussures ou des selles. L’artisanat artistique, traditionnel et de design, est l’âme vitale de la Sardaigne, un élément culturel essentiel d’un peuple qui transmet avec fierté des connaissances et des compétences séculaires.
Voyager avec goût
Frue, burrida, civraxiu, fregula, malloreddusu, casizolu, pani frattau, filindeu, tzilicca... Aucune préparation ad hoc pour ravir les palais, des notes simples et recherchées, des saveurs délicates et robustes associant savamment les produits terre-mer, des parfums d’assaisonnements spéciaux, des huiles extra vierges aux herbes sauvages. La gastronomie sarde est caractérisée par des gestes antiques et des rituels qui exaltent toute la maîtrise de la cuisine traditionnelle. Une gastronomie qui laisse les jeunes chefs s’exprimer et filtrer l’âme de leur terre à travers des plats ancrés dans les mémoires et dans l’histoire, une âme qui ne cesse de changer d’un lieu à l’autre. La Sardaigne est une terre de mélange où rien ne ressemble. Chaque village a ses propres traditions, sa propre culture, sa propre langue. La célèbre douceur « pas si douce » n’échappe pas à la règle. Pour la déguster à Nuoro, vous devrez demander une sevada, tandis qu’à Cagliari il vous faudra demander une seada. Dans d’autres parties de l’île, vous la trouverez également sous les noms de sebada, seatta ou encore sabada. Vous aurez à chaque fois l’impression de redécouvrir les nuances de ce dessert. Selon la ville, le fromage utilisé sera différent : pecorino ou lait de vache, cuit ou cru. Sans oublier le miel ajouté en fin de cuisson, délicat au Sud, plus âpre dans d’autres territoires.
Funtana Raminosa
Une grande page d’histoire : ici les peuples nuragiques extrayaient le composant essentiel du bronze, qui était fondu pour modeler de petites statues, des outils, des bijoux et des armes. Funtana Raminosa, qui compte parmi les gisements de cuivre les plus riches en Europe, est une des huit zones qui composent le parc géo-minier de la Sardaigne, inclus parmi les Géoparcs de l’Unesco, c’est un musée à ciel ouvert et en souterrain, pouvant être visité sur réservation, avec des machines opérationnelles à l'avant-garde à l’époque et actuellement en excellent état de conservation. Le ‘puits de cuivre’ s’étend sur une surface d’environ 150 kilomètres carrés et se trouve à dix kilomètres de Gadoni, un village de montagne immergé dans la Barbagia di Belvì, dont il représente l’histoire, l’économie et l’identité.
Protagoniste dès la préhistoire de la métallurgie de la Méditerranée, après les peuples nuragiques, le site fut exploité par les Phéniciens et les Carthaginois, puis par les Romains : c’est de leur époque que datent des ustensiles et un lingot que l’on a retrouvés ; on a découvert également les restes d’un mineur remontant à l’âge impérial. C'est aux héritages anciens que font référence deux des actuels 150 ‘tunnels’, les galeries Fenicia et Romana. La zone fut probablement fréquentée par les Sarrasins, au VIIIe siècle.
Les galeries romaines furent découvertes par les explorateurs de la fin du XIXe siècle, tandis que la ‘véritable’ activité industrielle date du début du XXe siècle. Au cours de quasiment tout le siècle les protagonistes de l’‘âge du bronze’ moderne ont été les entreprises espagnoles, belges, françaises, italiennes et même américaines. En 1936, la mine passa à la Société Anonyme Funtana Raminosa, qui favorisa la naissance d’un village minier avec une école, un dispensaire, un magasin, la chapelle dédiée à Sainte Barbara. Dans les années Cinquante 300 ouvriers travaillaient dans l’établissement, jusqu’aux années Soixante, quand la crise minière commença, avec la fermeture de nombreuses installations. On a tout essayé pour sauver l’activité, une installation de traitement du minerai de mille tonnes par jour fut même réalisée. Entrée en service en 1982, elle fonctionna à peine huit mois, puis ce fut le coup de grâce : Funtana Raminosa ferma en 1983. Aujourd’hui les anciens mineurs sont des guides à la découverte des installations, depuis 2020 elles sont ouvertes au public : armé de casque, vous écouterez leurs témoignages et observerez les chantiers d'extraction avec des installations de traitement du minerai, une partie des 150 galeries, des fouilles à ciel ouvert, la laverie conservée dans l’état dans lequel elle a été laissée le dernier jour de travail, des fragments d’histoire minière qui se succèdent entre les galeries, comme si le temps s’était arrêté. Le long des routes vers l’entrée de la mine, vous verrez le village, avec des logements mitoyens et des services, des bureaux à la cantine, de l’église à l’école, de l’infirmerie au magasin, jusqu’au petit édifice de la direction qui domine les installations sur une petite colline. Tout autour, un paysage féérique, sculpté au cours du temps, qui entrelace une nature superbe et des architectures industrielles.
La Sardaigne, une belle histoire
C’est un berceau entouré par la mer où il y a huit mille ans commença une civilisation mystérieuse et originale, ouverte aux innovations et aux contaminations culturelles, apportées par la mer d’une rive à l’autre de la Méditerranée ancienne. Les Sardes construisent des nuraghes sur les côtes avec des abris pour les bateaux, unis entre eux pour le contrôle de la mer et reliés à ceux qui ont été construits dans l’arrière-pays. La position de l’Île est stratégique, c’est un carrefour animé sur les routes commerciales fréquentées par les peuples navigateurs, parmi ceux-ci les pacifiques Phéniciens qui s’installeront en Sardaigne. Ils fondent celles qui seront les plus belles, cultivées et riches villes de tous les temps, Sulky, Bithia, Nora, Tharros, Karaly. Des biens, des idées et des connaissances circuleront librement entre les villes phéniciennes et les villages nuragiques jusqu’au moment où les peuples impérialistes débarquèrent assoiffés de nouvelles possessions.
Nuraghes, tours de lumière
Ils observaient le monde autour d’eux, la mer, le ciel, la terre, et réfléchissaient. Puis, ils commencèrent à construire de mystérieuses tours toujours plus complexes et cyclopiques qui marquent la Sardaigne de façon originale et inimitable. Nos ancêtres étaient d’extraordinaires architectes de la préhistoire. Ils ont conçu et bâti des milliers de nuraghes, uniques au monde. Plus de sept mille nuraghes sont visibles un peu partout. Aucun ne se ressemble mais ils suivent tous les même code stylistique. Qu’ils soient tournés vers les villages ou contemplent la mer, la plupart apparaît en campagne. Toutefois, où qu’ils soient et quelle que soit leur fonction, demeure du chef, forteresse, temple ou encore observatoire astronomique, vous pouvez ressentir autour d’eux un aura particulier. En plus de répondre à des besoins pratiques, les lieux choisis pour les ériger, des plus petits aux véritables palais, devaient avoir une signification transcendantale. Ce n’est pas un hasard si les nuraghes se trouvent à proximité de monuments mégalithiques de périodes antécédentes liés à la spiritualité, comme les domus de Janas, les menhirs ou encore les dolmens. D’autres encore, dédiés au culte, furent érigés à proximité de puits sacrés et de tombes des géants. Il s’agit de lieux spéciaux où vous pourrez vous promener parmi de grandes pierres l’esprit léger. Vous aurez naturellement l’impression de vous trouver dans une page d’histoire et de civilisation ancienne, dont le symbole est le nuraghe, que beaucoup considèrent comme un patrimoine.
Partez à la découverte de l’Île, parmi certains de ses majestueux palais nuragiques.
Janas, durant la nuit d’Halloween
Elle a probablement des ascendances préhistoriques, il est certain qu’on la célèbre depuis la nuit des temps et qu’elle ressemble aux fêtes de la tradition anglo-saxonne. C’est la nuit de fin octobre quand les royaumes de la lumière et des ténèbres s’unissent et permettent aux âmes des défunts, une fois les portes du Purgatoire ouvertes, de retourner dans les lieux auxquels ils étaient attachés et d’errer parmi les vivants. Les janas racontées dans les légendes populaires insulaires et à travers la tradition orale se distinguent parmi les âmes suspendues. Ce sont de petits esprits en équilibre entre ciel et terre, les fées ou les sorcières, selon les lieux où ils sont invoqués, ont une voix douce et une beauté enchanteresse. Les tombes creusées dans la roche, symbole d’un facies culturel diffusé dans toute la Sardaigne entre les IVe et IIIe millénaires av. J.-C. habitent les domus de Janas.