Safari made in Sardinia
Pour eux la Sardaigne est comme un parc étendu, un havre de paix d’oasis naturelles et de réserves protégées, même dans des paysages infinis où aucun panneau ne signale leur présence. Les quelques habitants de l’Île laissent suffisamment d’espaces à la nature tenace, animé par un esprit vif, l’habitat idéal pour de nombreuses créatures sauvages. Des animaux qui, sans la limite de la mer, auraient erré loin de leur terre et auraient perdu leurs caractéristiques particulières et probablement la liberté de vivre comme ils savent si bien le faire. De petits chevaux, des ânes, des mouflons, des cerfs, des aigles, des vautours fauves sont ici depuis toujours, d’autres arrivent ici pour passer l’hiver et, atteints du mal de Sardaigne, ne repartent pas. Comme les flamants roses qui nidifient dans les zones humides derrière les plages, colorant de rose les paysages lagunaires de l’Île.
Perdas fittas entre terre et ciel
Des lieux enveloppés de légendes et d’attraits, un monde ancestral qui parle à travers d’énormes pierres. C’est l’atmosphère que vous respirerez à Pranu Mutteddu de Goni et Bir’e Concas de Sorgono, dans le cœur verdoyant de l’Île, où des centaines de menhirs se concentrent : solitaires, en couples, en cercle ou en longues rangées qui symbolisent des parcours naturels, probablement orientés selon des phénomènes célestes. De la magie, de la sacralité et une puissance magnétique, comme dans la célèbre Stonehenge, mais ici les menhirs sont plus anciens et nombreux.
Plantées ‘au couteau’ dans le sol, les perdas fittas (les pierres, en sarde) s’élèvent vers le ciel entourés d’un paysage féérique : des bois de chênes séculaires, des prés de cyclamens et d’orchidées sauvages, des arbustes de lavande et de myrte qui parfument l’air. Même le ciel joue son rôle, le soleil filtre entre la nature vigoureuse et fait briller d’une lumière douce les énormes pierres à la forme allongée et effilée. Ils sont le refuge de l’âme, des lieux sensoriels qui enflamment l’imagination : tout ceci est-il réel ou s’agit-il d’une fable racontée par la nature ?
Une étreinte chaleureuse de la mer
Les brises et la houle dérobent à la mer un riche aérosol de sels et d’ions minéraux qui enveloppe les côtes de l’Île d’air pur, à respirer lentement et à pleins poumons. Extraordinairement belle, saine et pleine d’éléments précieux, elle se brise ensuite sur les paysages marins toujours différents, de petites îles, baies, plages de sable, quartz et coraux et des terrasses fantastiques de rochers. Ils deviennent tous d’exclusifs spas sur la mer sans limites d’horaires et de règlements, sans frais ils offrent le top du bien-être au naturel, eau, soleil, pierres, coquilles, rochers et sable. Ce sont les gymnases accueillants en plein air toujours ouverts pour tous ceux qui veulent se ressourcer en toute liberté et se débarrasser de leurs problèmes. Généreux mais fragiles ils demandent uniquement à être respectés car ils demeurent une réserve précieuse de bien-être, pour toujours et pour tous.
Scénographie sous le ciel étoilé
« Les îles du cinema » est un circuit de quatre festivals sur les îles mineures de la Sardaigne. Tavolara devient à la mi-juillet une immense salle sous la voûte étoilée, pour la Notte in Italia (nuit en Italie). Créé en 1991, ce pittoresque rendez-vous, devenu depuis un classique du paysage national, se concentre sur les réalisateurs et la créativité du cinéma italien. La rencontre et la connaissance entre public, artistes et responsables ont déjà lieu sur les bateaux qui rejoignent l’île au départ de Porto San Paolo, près de San Teodoro au sud d’Olbia. Dans trente ans, la crème du cinéma italien a foulé le seul tapis rouge qui trempe directement dans la mer, dans le cadre splendide de l’aire protégée de Tavolara-Capo Coda Cavallo. Le vernissage de «Una notte in Italia» 2024 mardi est 16 juillet, à la Peschiera di San Teodoro. Deux jours plus tard, le festival se déplace sur la petite place au bord de la mer à Porto San Paolo, tandis que du vendredi 19 jusqu'au dernier soir du dimanche, les spectacles se déroulent dans l'immense salle sous les étoiles de Tavolara, la montagne de granit qui s'élève de la mer.
L’exposition de l’Artisanat
L’essence de la Sardaigne est dans la trame d’un filé, dans les broderies d’un tapis et dans les formes d’une élégante robe traditionnelle. Son esprit est ‘tressé’ par des mains habiles dans une corbula de jonc ou d’asphodèle, il est enchâssé dans une maille filigrane, la technique par excellence de l’orfèvrerie sarde. La lumière de l’Ile brille dans une lame d’arresoja, dans le reflet d’un objet en verre ou dans le rouge intense d’un collier en corail. Son feu brûle dans la forme d’un meuble en fer forgé. Son âme est dans une sculpture en pierre, un symbole archaïque d’une terre millénaire. Connaitre la Sardaigne signifie s’enfoncer dans son identité la plus profonde et authentique à travers les techniques de décoration d’une scivedda (un récipient en céramique) et de gravure du bois d’une cascia (coffre nuptial) et de masques de carnaval, elle est dans le tannage des peaux pour en obtenir des chaussures ou des selles. L’artisanat artistique, traditionnel et de design, est l’âme vitale de la Sardaigne, un élément culturel essentiel d’un peuple qui transmet avec fierté des connaissances et des compétences séculaires.
Voyager avec goût
Frue, burrida, civraxiu, fregula, malloreddusu, casizolu, pani frattau, filindeu, tzilicca... Aucune préparation ad hoc pour ravir les palais, des notes simples et recherchées, des saveurs délicates et robustes associant savamment les produits terre-mer, des parfums d’assaisonnements spéciaux, des huiles extra vierges aux herbes sauvages. La gastronomie sarde est caractérisée par des gestes antiques et des rituels qui exaltent toute la maîtrise de la cuisine traditionnelle. Une gastronomie qui laisse les jeunes chefs s’exprimer et filtrer l’âme de leur terre à travers des plats ancrés dans les mémoires et dans l’histoire, une âme qui ne cesse de changer d’un lieu à l’autre. La Sardaigne est une terre de mélange où rien ne ressemble. Chaque village a ses propres traditions, sa propre culture, sa propre langue. La célèbre douceur « pas si douce » n’échappe pas à la règle. Pour la déguster à Nuoro, vous devrez demander une sevada, tandis qu’à Cagliari il vous faudra demander une seada. Dans d’autres parties de l’île, vous la trouverez également sous les noms de sebada, seatta ou encore sabada. Vous aurez à chaque fois l’impression de redécouvrir les nuances de ce dessert. Selon la ville, le fromage utilisé sera différent : pecorino ou lait de vache, cuit ou cru. Sans oublier le miel ajouté en fin de cuisson, délicat au Sud, plus âpre dans d’autres territoires.
La Sardaigne, une belle histoire
C’est un berceau entouré par la mer où il y a huit mille ans commença une civilisation mystérieuse et originale, ouverte aux innovations et aux contaminations culturelles, apportées par la mer d’une rive à l’autre de la Méditerranée ancienne. Les Sardes construisent des nuraghes sur les côtes avec des abris pour les bateaux, unis entre eux pour le contrôle de la mer et reliés à ceux qui ont été construits dans l’arrière-pays. La position de l’Île est stratégique, c’est un carrefour animé sur les routes commerciales fréquentées par les peuples navigateurs, parmi ceux-ci les pacifiques Phéniciens qui s’installeront en Sardaigne. Ils fondent celles qui seront les plus belles, cultivées et riches villes de tous les temps, Sulky, Bithia, Nora, Tharros, Karaly. Des biens, des idées et des connaissances circuleront librement entre les villes phéniciennes et les villages nuragiques jusqu’au moment où les peuples impérialistes débarquèrent assoiffés de nouvelles possessions.
Janas, durant la nuit d’Halloween
Elle a probablement des ascendances préhistoriques, il est certain qu’on la célèbre depuis la nuit des temps et qu’elle ressemble aux fêtes de la tradition anglo-saxonne. C’est la nuit de fin octobre quand les royaumes de la lumière et des ténèbres s’unissent et permettent aux âmes des défunts, une fois les portes du Purgatoire ouvertes, de retourner dans les lieux auxquels ils étaient attachés et d’errer parmi les vivants. Les janas racontées dans les légendes populaires insulaires et à travers la tradition orale se distinguent parmi les âmes suspendues. Ce sont de petits esprits en équilibre entre ciel et terre, les fées ou les sorcières, selon les lieux où ils sont invoqués, ont une voix douce et une beauté enchanteresse. Les tombes creusées dans la roche, symbole d’un facies culturel diffusé dans toute la Sardaigne entre les IVe et IIIe millénaires av. J.-C. habitent les domus de Janas.
Grazia et Maria, les révolutionnaires
Elles combattent les préjudices et mélangent les canons de la littérature moderne et de l’art contemporain, ce sont des âmes sœurs, taciturnes, avec une grande pensée et tant de rêves. Minuscules et chétives, elles font penser aux mythiques janas et libèrent comme celles-ci des énergies puissantes et féériques, en donnant la parole aux femmes de la Sardaigne la plus profonde et à la poésie de leurs lieux de naissance, Barbagia et Ogliastra. C’est ici que se rencontrent les œuvres les plus grandioses de Maria Lai, dans les campagnes d’Ulassai, le long des parcours de montagne vers ce miracle de la nature qu’est la grotte de su Marmuri et dans le bourg, à côté de celles des artistes internationaux qui ont souhaité en célébrer le génie créatif en marquant ces lieux de leur art. Maria Lai rendra le même hommage à Grazia Deledda en installant à Nuoro sa dernière œuvre, tout près de la chiesa della Solitudine (église de la solitude) où repose l’unique femme italienne prix Nobel de littérature. Andando via est un parcours dans les silences pleins de vie des femmes de Deledda, entre les lieux habités par les mythes et les légendes millénaires, un monde poétique qui a nourri la sensibilité artistique des deux.
Cagliari en plein air
Des circuits fitness en plein air dans les parcs et les oasis naturelles au cœur de la ville, des pistes cyclables et des parcours piétonniers dessinés sur des kilomètres de bord de mer qui vont du centre historique jusqu’à la plage du Poetto, où les voitures sont interdites. Ce sont des gymnases en plein air où la lumière est intense et la chaleur réconforte, où l’air est bon et émet des senteurs de saumâtre et de maquis. Le fait de le respirer profondément durant l’activité en plein air fortifie le corps et l’esprit, sentir le vent sur la peau et le bruit du ressac dans le fond sont une sensation surprenante de bien-être. Après les séances d’aquagym et de yoga au bord de la mer, une excursion en voilier dans le golfo degli Angeli (golfe des Anges), la course dans les espaces verts et le trekking dans les forêts voisines, qu’il y a-t-il de mieux que de savourer les saveurs de la Sardaigne ? Eh oui, ici vous trouverez la meilleure cuisine, comme le dit ‘il Gambero Rosso’, à Cagliari on mange bien et sain. Sur les tables on perçoit la mémoire du savoir-faire et la recherche du bon et de l’authentique qui voyagent transversalement des trattorias typiques aux restaurants étoilés, jusqu’aux délicieuses cuisines de rue qui n’oublient pas les plats de tradition.